Pour les visiteurs du Jardin, le premier contact avec la diversité des plantes est souvent l’émerveillement.
Plaisir d’apprendre, grâce aux fiches des plantes sur ce site (à consulter ici, ou en anglais ici), qui permettent de découvrir comment ces plantes sont utilisées en cuisine et en phytothérapie depuis des milliers d’années.
Enthousiasme, pour leurs caractéristiques, ce qu’elles ont à nous apporter et comment vivre en symbiose avec elles.
En Scandinavie, où l’hiver est long et l’été, lumineux, le printemps revêt une charge symbolique beaucoup plus forte. La lumière se fait et la nature explose alors que les pousses sortent de terre. Joie et intérêt.
Une promenade dans le Jardin nous invite à interroger notre propre regard sur le monde végétal. En particulier, la difficulté qu’éprouve la majorité d’entre nous à percevoir et à prêter attention aux plantes : alors que celles-ci sont omniprésentes dans la plupart des environnements, et très souvent avec un grand nombre d’espèces sur de faibles surfaces, nous avant du mal à comprendre leur rôle fondamental dans l’écosystème.
Cette résistance à ouvrir notre regard aux plantes a été théorisée par deux botanistes Américains sous le nom de « plant blindness », ou cécité botanique.
Celle-ci a ses racines dans l’étrangeté extrême des plantes par rapport à nous, leur « végétalitude », qui nous les rend plus difficiles d’accès que les animaux, chez qui nous pouvons plus facilement nous retrouver.
Alors, comment dépasser cette inattention, apprécier l’esthétique et les caractères biologiques uniques des plantes plutôt que de les voir comme décors de fond ?
D’une certaine manière, le cerveau ne perçoit que ce qu’il connait déjà, ce dont il peut faire sens. La réponse repose donc dans l’expérience de la nature – c’est-à-dire le contact avec les plantes, leur beauté, leur caractéristiques physiques (couleur, parfum, taille…), mais aussi les émotions, le sens symbolique que chacun d’entre nous leur attribue et l’histoire personnelle que nous y associons (en particulier les souvenirs d’enfant).
Cette introspection végétale se construit dès le plus jeune âge : plus l’éducation valorise les expériences directes avec les plantes, plus l’individu noue des contacts avec ces « autres ». Les activités de plein air, l’expression artistique, et les aspects symboliques (comme le lien avec les saisons) créent des conditions indispensables pour comprendre et soutenir l’importance de la conservation de la biodiversité végétale.
Pour que la gratitude pour la flore qui nous entoure nous incite à réfléchir aux gestes quotidiens par lesquels nous pouvons la protéger.
Des gestes individuels, comme ceux que vous pouvez voir ici.
Des gestes collectifs, comme ceux des observatoires de la biodiversité, des enquêtes et études participatives. Comme ceux aussi des associations et des revues qui éduquent les enfants à la nature : par exemple l’association Humanité et Biodiversité (à découvrir ici), qui milite pour la prise de conscience et les actions concrètes ; la CPN la Catignolle (à découvrir ici), qui participe à rétablir le lien entre l’humain et la nature à Port-Mort, près du Jardin ; et tant d’autres.
Et vous, qu’est-ce qui vous fait ouvrir les yeux ?
Marie-France Fourrier
Schussler, Elizabeth, et Wandersee, James. “Toward a Theory of Plant Blindness”, in Plant Science, (47.1), 2001